L’Opium et le bâton de Ahmed Rachedi est une adaptation filmique de l’œuvre du même titre de Mouloud Mammeri sur un pan de l’histoire de la colonisation française en Algérie. Réalisé en 1969, ce long métrage de 130′ qui a pour contexte la guerre d’indépendance ou de décolonisation en Algérie. A travers ce film Ahmed Rachedi plonge le spectateur dans l’histoire de l’Algérie avec des scènes de guérilla dans un village où la population persécutée se bat pour faire partir l’armée d’occupation.
L’Opium et le bâton rappelle le récit du film La bataille d’Alger en 1966 de l’italien Gillio Pontecorvo, une adaptation d’un autre film anticolonialiste. Ahmed Rachedi révèle dans son récit qu’aucun individu n’est épargné des affres, supplices, humiliations, en somme des tortures psychologiques et physiques de l’occupant dans le village de Thala.
Engagés à s’autodéterminer les villageois se sont organisés pour faire face aux conditions de vie pénibles qui leur sont infligées. Une guérilla urbaine se met en place et les actions commencent à donner de l’insomnie au colonisateur. Voyant de plus en plus la réussite stratégique des maquisards, les troupes françaises s’amenuisent et font appel lors de l’ultime bataille, à l’aviation militaire pour les aider face à un probable échec.
Le film L’Opium et le bâton suscite des réflexions sur le rôle de l’intelligentsia locale dans les luttes de libération comme l’a si bien joué le Docteur dans le film. Il est également question de l’engagement de la communauté pour mettre en échec la stratégie de domination de l’occupant ; la place de la religion, du crieur public. Mais le film montre surtout les stratégies de dislocation des familles par les impérialistes en choisissant des esclaves de salon comme Belaïd ; on voit aussi les efforts visant à affamer les populations et la destruction des infrastructures. Ce dernier aspect rappelle l’histoire de la révolution guinéenne en 1958. Des thématiques qu’on peut aujourd’hui comparer à celles liées aux bouleversements géopolitiques que connaissent le Sahel et d’autres parties du monde.
Le titre L’Opium et le bâton est métaphorique. Dans le film on peut déduire que l’opium désigne tous les moyens utilisés pour empêcher un éveil de conscience de la population ou pour corrompre les leaders et ainsi empêcher l’émancipation ; le bâton peut illustrer la force, la violence contre ceux qui luttent contre l’occupant et pour leur liberté comme Ali.
Malgré son caractère dramatique et nuageux, le film comporte aussi du comique dans certaines scènes et donne de l’espoir en suscitant la fibre patriotique.
L’Opium et le bâton est lauréat du troisième Prix au Festival Panafricain de Cinéma et de la Télévision de Ouagadougou (FESPACO) en 1972.
Youssoufa H. Harouna