Beaucoup utilisé en Afrique, le pagne sert pour entre autres, cacher le corps, la tête en guise de foulard, comme celui légué à Mariam par sa mère dans la pathétique scène de leur séparation, dans le film Le Pagne (drame) 90mn sorti en 2016, de Moussa Hamadou Djingarey. Ce qui peut bien expliquer le choix par le réalisateur nigérien du titre Le Pagne pour cette fiction inspirée d’une réalité, afin de raconter l’histoire douloureuse vécue par Mariam, le personnage principal.
C’est la dernière scène du film qui ouvre cette fiction inspirée d’une histoire réelle, ainsi que le révèle le sous-titrage. Une jeune fille en larmes lit sur un pagne blanc le récit de la vie difficile de sa maman, Mariam. Une vie marquée par l’excision dès la petite enfance, le viol et une grossesse non désirée à l’adolescence, le rejet par la société, la prostitution, le meurtre, la condamnation, l’accouchement et la mort en prison, tout cela dans la solitude et le silence. Ce mutisme qui caractérise Mariam tout au long du film donne un cachet particulier à la démarche du réalisateur. Et c’est sur un pagne hérité de sa mère que Mariam a légué à son tout à sa fille(Safia) issue de son viol née en prison que le réalisateur raconte toutes les souffrances endurées son personnage.
A travers le choix par le réalisateur du titre « le pagne », objet symbolisant dans certains cas, la féminité, la pudeur, on peut comprendre sa volonté d’interroger sa société sur les pratiques néfastes dont sont victimes les femmes en milieu traditionnel. C’est du reste à toutes ces victimes silencieuses comme Mariam que Moussa Hamadou Djingarey a dédicacé cette œuvre, dans laquelle il rend également hommage à la femme pour sa patience, son endurance,…
Plus qu’un tissu pour se couvrir, pour se faire beau, le pagne est retrouvé dans certaines sociétés au début et à la fin de la vie sur terre. Le bébé qui vient au monde est accueilli sur un tissu. C’est le cas de Safia la fille de Mariam née en prison qui est enveloppée dans le pagne hérité de sa grand-mère. Cette fille découvrira l’histoire de sa maman écrite sur ce tissu. Aussi, c’est dans un pagne (linceul) que l’être humain est accompagné à sa dernière demeure chez les musulmans.
Comme dans son film, Hassia, Amour ou châtiment (2010) où on retrouve certains acteurs de la fiction Le Pagne notamment les comédiens connus sous les surnoms de Kaza et Andigué dans les rôles de la mère et du père de Mariam, le réalisateur évoque des problèmes de violences faites aux femmes.
Le film Le Pagne qui reste d’actualité amène à s’interroger sur la responsabilité des uns et des autres dans la souffrance qu’endurent les filles. Dans ce sens on peut indexer la responsabilité des femmes dans la pratique de l’excision. Mais il y a surtout la responsabilité de l’ensemble de la société au regard de l’intolérance, du rejet dont Mariam a fait l’objet du fait d’une situation qu’elle n’a jamais souhaité vivre.
Cet article a été rédigé par des étudiants de l’IFTIC(ESCOM) et de l’INJS/C lors des ateliers de la critique organisés à Niamey par l’ANCCCC dans le cadre du programme expression citoyenne.
Sous l’encadrement de : Dr Yousouf H. Harouna, Journaliste et critique de cinéma et Souley Moutari, journaliste et critique de cinéma