Le court métrage L’envoyée de Dieu (2022) d’une durée de 23’ est une fiction dramatico-comique réalisée par Amina Abdoulaye Mamani du Niger. Le film retrace le parcours de Fatima, une fille âgée d’une dizaine d’année, kidnappée par des terroristes et embrigadée pour commettre sa première et unique opération kamikaze sur un marché où se trouve sa mère. Mais s’est sans compter avec la force mentale de la jeune fille. En compétition officielle au FESPACO 2023, ce court métrage coproduit par Diam Production, Karekezi Film Production et Tabou Production a remporté quatre prix spéciaux et une mention spéciale pour sa sensibilité.
Le film a une allure d’enquête policière avec beaucoup de suspens, où tout est minutieusement conduit. Les images, le son et le rythme participent pleinement au récit filmique bien scénarisé. La séquence pour le conditionnement par les terroristes de la jeune fille à s’exploser l’illustre parfaitement.
Le rituel conduit par des femmes voilées toutes de couleurs noires et l’acteur Tchadien Youssouf Djaoro reflètent assez bien la physionomie et le profil des terroristes que l’on voit sur les nouveaux médias et laisse entrevoir l’absence d’humanité chez ces personnes qui ont dévoyé les valeurs religieuses.
La relation entre le décor et les costumes du rituel, dont le tissu blanc étalé le long de la table, la jeune fille couverte de tissu blanc, les femmes voilées rappellent d’autres rituels ancrés dans certaines thématiques des films en Afrique tels que : la circoncision, l’excision, la cérémonie funèbre et même les investitures de leaders politiques.
A travers le récit, la réalisatrice interroge la société sur sa responsabilité face aux enjeux du vivre ensemble dans la tolérance. Elle pose surtout la question de l’engagement pour la liberté, du choix à s’autodéterminer même dans les moments difficiles.
L’envoyée de Dieu est un film d’une grande portée morale et de conscientisation. Les techniques cinématographiques choisies permettent de rendre compte du contexte où sont vécus les actes terroristes. Les plans larges qui donnent une précision sur l’environnement, le flash-back dans la séquence où Fatima revoit en souvenir une explosion avec une forte détonation qui a secoué le marché.
Amina Mamani Abdoulaye a réalisé un film sur une thématique très actuelle, qu’est le terrorisme qui s’étend de manière progressive dans les pays du Sahel avec son lot de déplacés internes incalculables, de désolation, de pillages. Une situation qui crée aussi un climat de méfiance et de défiance entre les communautés et les pouvoirs qui vivaient paisiblement autrefois. Mais où sont les États tout au long de ce film ?
Youssoufa Halidou Harouna
