Samba le Grand et Toula ou le génie des eaux de Moustapha Alassane : le conte et la légende, outils de transmission des cultures

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La reine, dans Samba le grand

Le conte et la légende sont enracinés dans la société nigérienne, surtout traditionnelle. Il n’est d’ailleurs pas rare de voir des ouvrages d’auteurs nigériens et africains, adaptés par le cinéaste Moustapha Alassane pour conter le quotidien de la société à travers des thématiques évoquées dans cet article : la chefferie ou le roi, le héros, l’eau. Les films Samba le grand (1977), une animation et Toula ou le génie des eaux (1973), une fiction sont des parfaites illustrations. Leurs contenus, véhiculant toujours un message, des leçons de morale de vie qui nous permettent d’acquérir un savoir nouveau ignoré ou une réalité que nous voyons sous une autre forme. Ce qui fait du conte et la légende de véritables outils de transmission et de préservation des cultures locales.

Séquence du film Samba le grand

Le conte et la légende dans les films de Moustapha Alassane : des traditions orales affirmées

La littérature orale est très présente dans les films des pionniers. C’est le cas du conte et de la légende. On peut les définir comme étant des histoires parfois fabuleuses qui plaisent, et peut être vraies ou fictives visant à distraire ceux qui écoutent et à transmettre les pratiques ancestrales. Pour Dr Mariama Hima,  «  le conte est une production vocale ; chacun est producteur et consommateur : chacun est à volonté auditeur et orateur ». Malgré le caractère populaire que laisse sourdre cette assertion, il n’en demeure pas moins qu’il faut avoir un capital d’expériences et de talents pour exercer la fonction de conteur ». (Hima, 1991 : 39). Justement Moustapha Alassane, pionnier du cinéma nigérien, le premier créateur de film d’animation en Afrique Noire, nous donne toutes les raisons de croire, que pour raconter un conte ou une légende, il faut nécessairement des prédispositions pour capter l’attention de l’auditoire. Au-delà même de cette création littéraire, nous pouvons évoquer la création artistique avec les films de Moustapha Alassane.

Tous ses films répondent aux caractéristiques d’un conteur qui raconte une histoire. Le conte relate des faits passés comme l’histoire d’ailleurs mais ils sont tournés vers la transmission des savoirs au présent et au futur. Le film La mort de Gandji l’illustre. Moustapha Alassane, dans un art oratoire, nous amène à suivre à la manière dont racontent les savants, les contes aux enfants et aux jeunes, le film qu’il a eu à réaliser lors d’un stage au Canada en 1964. Nous pouvons noter, à travers le film La mort de Gandji, l’organisation du village autour de leur chef, qui se préoccupe de la vie de la communauté pour le meilleur et pour le pire. Bien d’autres films d’animation ou de fiction de Moustapha Alassane réservent une place pas des moindres à la chefferie et au héros. Héros qui peut mourir dans le film.

La place de la chefferie et du héros chez Moustapha Alassane

Au Niger bien avant la colonisation, certains villages avaient des chefs traditionnels. L’administration coloniale à son arrivée avait donné plus de pouvoir aux rois, sultans, chefs de village pour servir de relai dans la transmission du message colonial.  Pour ainsi dire, la chefferie est dans le quotidien de la vie de la société au Niger. Dans Contes et légendes du Niger (1972) de Boubou Hama, on y retrouve des histoires africaines dont Toula. D’ailleurs ce chapitre de l’œuvre fut adapté en film par Moustapha Alassane en 1973. Période qui coïncidait à un moment sombre des populations nigériennes avec une grande sécheresse.

Séquence du film Toula ou le génie des eaux

Ici dans le film, la priorité, la préoccupation du roi est de rendre heureux ses sujets même par le sacrifice suprême d’un être le plus cher. Le roi ou la reine se préoccupe des questions qui touchent sa communauté pour leur bien-être. Dans Samba le grand (1977), la reine malgré les défis lancés à Samba Gana, que ce dernier a relevé, elle, reste toujours insatisfaite.

Dans une voix off, Jean Rouch relate : « Samba Gana lui demanda pourquoi ne ris-tu pas ? Analiatoubari dis-je c’est vrai, j’ai maintenant tout ce que je voulais et tout le monde me respecte. Mais je ne peux pas rire, je ne peux pas rire devant la souffrance de mon peuple, je ne peux pas rire parce que le serpent « issa béri » nous demande trop pour nous donner de l’eau. Une fois, chaque année, il nous demande une fille et c’est seulement après ce sacrifice qu’il nous permet de prendre l’eau, tant que ce serpent « issa béri vivra », je ne pourrais pas rire ». (Alassane, 1977 : 4’35’’).

Dans ce film, comme d’ailleurs dans Toula ou le génie des eaux le roi ou la reine sont les protecteurs de leurs communautés. On peut aussi, voir une continuité de Toula dans le film Samba le grand. La fin du film Toula, qui voit la nièce du roi se faire engloutir par le serpent trouve sa réponse dans Samba le grand ou la princesse devenue reine après la mort de son père, se faire venger par un héros, qui tua le serpent « issa béri » au bénéfice des villageois. Mais la reine et le héros se tuèrent, en laissant des marques aux villageois. Ces deux films, nous apprennent l’importance du sacrifice de soi pour le bien commun.

Youssoufa Halidou Harouna

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